dimanche 14 novembre 2021

Aplats rouges et voitures



 Pour agrémenter mon café-crème et selon un rituel prémédité j'ai pu m'installer tranquille à la terrasse réduite et désertée sous l'auvent (qui doit être bleu) du café du Commerce avant la pluie. D'emblée le sujet s'est imposé, pile en face, les auvents rouges et les autos garées. L'idée première assez fière d'elle était de ne tracer au crayon de couleur rouge (Red Derwent Lightfast) les seules choses rouges devant moi et passer du même trait des contours de rectangles aux courbes étudiées des automobiles modernes pour remonter chercher les briques des deux façades souvent regardées pour leur qualité ornementale depuis ce même point de vue. Les designers automobiles soignent leurs lignes et inventent des galbes complexes, y compris pour les feux arrière. Il y a suffisamment de rouge à reporter. Mais c'est bien difficile de respecter une règle radicale et restrictive quand le dessin se forme bien et que le plaisir à tracer ne s'émousse pas. Ça donne aussi le temps de penser ajouter d'indispensables touches de jaune et de choisir très vite en touche finale de faire jouer par le jaune (Derwent Lightfast Sun Yellow) le beau vert-jaune très lumineux de la Ford. Hors champ sur la droite le clocher de Viollet le Duc terminé en 1865 donc bien visible par Bazille avant son décès tragique le 28 novembre 1870. Monsieur Richard me l'a confirmé hier soir, lui dont le texte factuel a servi de source à l'écrivain Michel Bernard qui évoque la figure de Frédéric Bazille dans son beau livre intitulé Deux remords de Claude Monet. Monsieur Richard refera une visite guidée des lieux clefs de cette bataille, le 27 novembre prochain. 

vendredi 12 novembre 2021

Mais c'est irrésistible



 Je me demande parfois s'il n'y a pas trop de Ginkgos biloba. A Paris l'avenue de France en aligne des dizaines. Des feuillages encore assez verts côtoient des spécimens très jaunes et d'autres en voie de dénuement hivernal plus avancé. Je les vois en sortant de la BNF. Mardi quand soudain j'ai éprouvé le besoin impérieux de me rendre sur les lieux de deux des peintures célèbres de Caillebotte, Le Pont de l'Europe et Paris sous la pluie, ce n'est pas de la pluie qui tombait mais quelques feuilles de Ginkgo sur les tables mauves ou jaunes de la terrasse du Bistrot en Ville dont un coin de la vitrine figure dans le champ cadré par le tableau. Je suis resté là un moment, la lumière déclinante accentuant les effets de lampadaires dans les feuillages. J'en ai compté environ une dizaine établis sur le carrefour. Il faut bien dire qu'ils masquent un peu, avec l'élevage de motos qu'ils abritent, l'épure parfaite de ce tableau que les parisiens peuvent aller contempler à Chicago. J'aime bien la feuille de Ginkgo, diversement bilobée, le très grand du jardin des Champs-Elysées, proche d'un kiosque à crêpes et du théâtre de l'Espace Pierre Cardin, produit des feuilles très peu fendues, j'en avais glissé dans un livre le jour où j'étais allé trop tard ne constater que le déshabillage de l'Arc de Triomphe. Mais c'est irrésistible, les feuilles de Ginkgo sont faites pour être dessinées. 

mercredi 10 novembre 2021

Je sais où je vais


 C'est ce que j'ai titré en passant devant la Gare Saint-Lazare par la gauche pour remonter la rue de Rome et atteindre les deux sites visés par ma promenade soudainement décidée une demi-heure auparavant. Il faisait beau, il n'était pas trop tard, pas encore dix-sept heures et je pouvais bien incarner mes recherches sur Caillebotte dans une déambulation parisienne précise, me rendre au site du Pont de l'Europe et au carrefour des rues de Turin, Moscou, Saint-Petersbourg et Clapeyron, pour repérer, pour la deuxième fois en une petite quinzaine d'années les deux sites soigneusement cadrés par le jeune Gustave Caillebotte au milieu des années 70 du dix-neuvième siècle. Car c'est mon affaire que d'étudier les œuvres en m'en servant de tremplin pour plonger dans le réel des lieux, qui persistent quelles que soient les altérations des quelques cent cinquante années passées. C'est pourquoi je disais "Je sais où je vais". 

dimanche 7 novembre 2021

Conscience du "Tableau"

En allant chercher le pain, toujours un œil pour le clocher reconstruit par Viollet Le Duc et la question de savoir si Frédéric Bazille l'a vu à la veille de sa mort hélas quand il s'est élancé exposer son grand corps aux balles ennemies peu de temps après avoir déclaré à ses compagnons sa confiance de ne pas mourir puisqu'il avait tant de choses à faire. Il aura néanmoins, si jeune, laissé une œuvre peinte récemment reconsidérée par le musée d'Orsay. 
Mais la motivation première aura sans douté été la rencontre des couleurs dans les reflets de la voiture neuve. Conscience du "tableau" au sens perspectif, car c'est le point essentiel à comprendre pour prendre ses repères dans cette affaire de structure perspective. Et les surfaces réfléchissantes, qu'elles soient planes ou courbées, sont d'excellents supports d'images qui répondent au nom perspectif de "tableau".